Acheter un bien immobilier à plusieurs est une stratégie de plus en plus prisée, que ce soit en famille, entre amis ou en couple non marié. Elle permet de mutualiser les apports, d’accéder plus facilement au crédit et de constituer un patrimoine commun.

Mais au-delà de l’aspect financier, le mode d’acquisition joue un rôle crucial : faut-il privilégier l’indivision, créer une SCI (Société Civile Immobilière) ou insérer une clause de tontine dans l’acte d’achat ?

Chaque option a ses avantages, contraintes juridiques et conséquences fiscales. Choisir correctement permet de sécuriser l’investissement et d’éviter conflits ou blocages à long terme.

 

 

L’indivision : simplicité mais vigilance nécessaire

 

Définition

L’indivision se produit lorsque plusieurs personnes achètent un bien sans créer de structure spécifique. Chaque acquéreur détient une quote-part du bien selon sa contribution financière.

 

Avantages

  • Simplicité : aucun formalisme particulier, l’indivision est le régime par défaut.
  • Coût faible : pas de frais supplémentaires hormis l’acte notarié classique.
  • Flexibilité d’usage : chaque indivisaire peut utiliser le bien, sous réserve des règles de majorité.

 

Gouvernance et prises de décisions

Selon l’article 815-3 du Code civil :

  • Actes d’administration (ex. travaux courants, bail d’habitation) : majorité des 2/3 des droits indivis.
  • Actes de disposition (vente, hypothèque) : unanimité nécessaire.

 

Inconvénients

  • Blocages possibles : décisions importantes requièrent parfois l’accord de tous, surtout pour vendre ou hypothéquer.
  • Sortie compliquée : si un indivisaire souhaite se retirer, il peut provoquer une licitation judiciaire, ce qui entraîne des frais et délais.
  • Transmission : en cas de décès, les héritiers entrent dans l’indivision, ce qui peut compliquer la gestion.

 

Prévention des conflits

Une convention d’indivision est fortement recommandée pour :

  • Organiser les droits et obligations de chaque co-acquéreur.
  • Définir les modalités de sortie ou de rachat des parts.
  • Préciser la répartition des charges et travaux.

L’indivision est adaptée aux projets simples et temporaires, mais présente des risques pour les investissements long terme ou familiaux complexes.

 

 

Investissement à plusieurs avec une SCI

 

 

2. La SCI : souplesse et optimisation patrimoniale

 

Définition

La Société Civile Immobilière (SCI) est une société qui détient le bien immobilier. Les associés possèdent des parts sociales, non le bien directement, ce qui permet de gérer et transmettre le patrimoine de façon structurée.

 

Avantages

  • Souplesse statutaire : les statuts fixent la majorité nécessaire pour chaque décision (majorité simple ou qualifiée).
  • Transmission facilitée : possibilité de donner des parts progressivement, avec des abattements fiscaux.
  • Optimisation fiscale : choix entre IR (translucidité fiscale) ou IS, selon objectifs patrimoniaux.
  • Séparation du patrimoine : le bien est distinct du patrimoine personnel des associés.

 

Contraintes

  • Frais de création : environ 1 000 à 2 000 € pour la rédaction des statuts et formalités.
  • Gestion comptable : tenue annuelle obligatoire d’une comptabilité et assemblées générales.
  • Garantie bancaire : certaines banques demandent des garanties personnelles pour les emprunts.

 

Fiscalité et obligations

  • Régime par défaut : IR — chaque associé déclare sa quote-part des revenus fonciers via formulaire 2072.
  • Option IS : possible mais entraîne modification de l’imposition des plus-values et amortissements, à étudier avec un expert.

La SCI est l’outil de référence pour les familles et investisseurs patrimoniaux souhaitant anticiper la succession et sécuriser la gestion du bien.

 

 

3. La clause de tontine : protéger le survivant

 

Définition

La clause de tontine, ou pacte tontinier, est intégrée dans l’acte d’achat. Elle stipule que le survivant devient seul propriétaire du bien au décès d’un co-acquéreur.

 

Avantages

  • Protection du survivant : le bien n’entre pas dans la succession du défunt.
  • Simplicité de mise en place : clause intégrée directement dans l’acte notarié.
  • Sécurité juridique : le survivant est propriétaire depuis l’origine, aucun partage n’est nécessaire.

 

Limites et fiscalité

  • Rigidité : impossible de vendre sa part tant que les deux sont en vie.
  • Fiscalité : en principe, le survivant supporte des droits de mutation à titre gratuit (DMTG) sur la part du défunt (BOFiP).
  • Usage limité : surtout pertinent pour couples non mariés ou pacsés ; peu adapté à des amis investisseurs.

La tontine est idéale pour protéger un conjoint ou partenaire, mais moins flexible pour les projets d’investissement collectif.

 

 

Rénover un appartement à plusieurs

 

 

4. Tableau comparatif : indivision vs SCI vs tontine

 

Critère Indivision SCI (Société Civile Immobilière) Clause de tontine
Définition Acquisition en commun sans structure Société détenant un ou plusieurs biens Clause intégrée dans l’acte d’achat
Décisions / Gouvernance Actes d’administration : majorité 2/3 ; actes de disposition : unanimité Statuts fixent la majorité nécessaire Rigidité extrême, aucun acte sans accord mutuel
Transmission / succession Héritiers entrent dans l’indivision Facilitation via donation de parts Survivant devient propriétaire unique
Fiscalité Revenus fonciers (IR) IR ou IS selon option DMTG « en principe » sur part du défunt
Coût initial Aucun frais supplémentaire 1 000 à 2 000 € Inclus dans l’acte notarié
Profil idéal Amis ou couple pour projet temporaire Famille, investisseurs patrimoniaux Couple non marié/pacsé à protéger

 

 

5. Quel choix selon le profil d’acquéreurs ?

 

  • Couple non marié / pacsé : tontine pour protéger le survivant, éventuellement SCI pour plus de souplesse et transmission future.
  • Famille souhaitant anticiper la succession : SCI recommandée pour gérer et transmettre le patrimoine avec optimisation fiscale.
  • Amis investisseurs : indivision possible pour projet simple et court terme ; SCI préférable pour projet durable et éviter blocages.
  • Investisseurs patrimoniaux : SCI pour flexibilité de gestion, transmission et optimisation fiscale ; indivision ou tontine moins adaptées.

 

 

 

6. Points de vigilance avant d’acheter à plusieurs

 

  1. Prévoir la sortie : cession de parts ou vente du bien dans les statuts de SCI ou via convention d’indivision.
  2. Évaluer la fiscalité : revenus fonciers, régime IR/IS, droits de mutation, DMTG pour tontine.
  3. Se faire accompagner par un notaire : indispensable pour rédiger une convention, des statuts SCI ou intégrer une tontine.
  4. Choisir ses co-acquéreurs avec prudence : confiance et vision patrimoniale partagée essentielles pour éviter conflits futurs.

 

Achat appartement en SCI ou SARL

 

 

7. Cas pratiques et illustrations concrètes

 

Pour bien comprendre les différences entre l’indivision, la SCI et la tontine, rien de mieux que d’imaginer des situations réelles. Ces exemples concrets permettent de visualiser les avantages et limites de chaque solution.

 

Exemple 1 : deux amis investissent dans un appartement destiné à la location saisonnière.

  • En indivision, chacun détient une part correspondant à son apport initial. Le problème survient si l’un souhaite vendre rapidement : il peut contraindre l’autre à céder le bien, ce qui met en péril le projet locatif.
  • Avec une SCI, les statuts fixent à l’avance les conditions de sortie, comme le droit de préemption de l’autre associé. Cela évite une vente forcée et permet de sécuriser l’investissement.
  • La tontine, en revanche, est inadaptée : elle bloque toute cession de part et n’apporte aucun avantage pour des partenaires purement financiers.

 

Exemple 2 : un couple non marié achète sa résidence principale.

  • L’indivision fonctionne, mais elle expose le survivant au risque de devoir partager avec les héritiers du défunt.
  • La tontine offre une protection maximale : au décès de l’un, le survivant devient automatiquement propriétaire unique, sans passer par une succession.
  • La SCI reste intéressante si le couple envisage aussi une transmission progressive aux enfants, tout en conservant de la souplesse dans la gestion du patrimoine.

 

Exemple 3 : une famille acquiert un immeuble de rapport.

  • En indivision, la gestion se complique vite : chaque décision nécessite l’accord des héritiers copropriétaires.
  • En SCI, tout est prévu dans les statuts : pouvoirs du gérant, répartition des bénéfices, organisation des votes… Elle facilite également la transmission, car on peut donner des parts sociales de manière échelonnée, en profitant des abattements fiscaux.

 

Indivision, SCI ou SARL ?

 

 

8. Le financement bancaire : un critère souvent oublié

 

Le choix du montage juridique influence directement la façon dont la banque va examiner le dossier :

  • En indivision, tous les acquéreurs sont solidairement responsables du crédit. Si l’un d’eux ne rembourse plus, les autres doivent assumer la totalité.
  • En SCI, c’est la société qui contracte le prêt, mais en pratique les banques exigent presque toujours une caution solidaire des associés. Cela limite la protection théorique, mais offre une gestion collective du crédit.
  • En tontine, les établissements financiers sont parfois réticents, car ce mécanisme bloque la sortie et ne permet pas d’anticiper facilement une revente. Le financement peut donc être plus difficile à obtenir.

Conseil d’expert : avant de choisir entre indivision, SCI ou tontine, il est indispensable de consulter à la fois son notaire et son banquier. Leur double regard permet d’anticiper non seulement les conséquences juridiques et fiscales, mais aussi la faisabilité du financement.

 

 

10. Les erreurs fréquentes à éviter

 

Lors d’un achat immobilier à plusieurs, certains pièges reviennent souvent :

  1. N’acheter qu’en indivision simple sans rédiger de convention. Cela provoque des blocages en cas de désaccord ou au moment d’une succession.
  2. Créer une SCI sans réfléchir au régime fiscal. Beaucoup optent pour l’IS sans mesurer les conséquences futures sur la plus-value.
  3. Utiliser une tontine pour un projet patrimonial collectif. Ce mécanisme n’est pas conçu pour gérer des biens locatifs ou familiaux, mais pour protéger un conjoint.
  4. Ignorer la question de la sortie. Quel que soit le montage, il faut prévoir comment un associé pourra revendre sa part ou quitter le projet.

 

 

 

11. Conclusion : quel choix pour quel projet ?

 

Acheter à plusieurs est une excellente stratégie pour accéder à la propriété ou investir dans l’immobilier, mais le choix du cadre juridique conditionne la réussite du projet.

  • L’indivision : solution simple et rapide, mais à sécuriser avec une convention d’indivision pour éviter les blocages.
  • La SCI : l’outil le plus souple et complet pour les projets familiaux, patrimoniaux ou d’investissement locatif. Elle permet d’anticiper la transmission et d’organiser la gestion sur le long terme.
  • La tontine : une option efficace pour protéger un couple, notamment non marié, en cas de décès. Mais elle reste rigide et inadaptée aux projets d’investissement collectif.

Le meilleur réflexe est de consulter son notaire dès la phase de réflexion. Cet accompagnement permet de sécuriser l’achat, d’éviter les erreurs coûteuses et d’adopter la structure la plus adaptée à sa situation.

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